Bébé et lien affectif : comment la parole précoce soutient le développement de la relation
On croit souvent que la communication avec un bébé commence le jour où il naît. Pourtant, les recherches en neurosciences affectives montrent que le lien se tisse bien avant, dès la grossesse.
Pendant mes années de travail en néonatologie, réanimation néonatale et soins palliatifs, j’ai vu combien la parole et la présence pouvaient soutenir les bébés, même dans les situations les plus fragiles. Aujourd’hui, au cabinet, j’accompagne aussi les parents et bébés dans cette relation précoce, qu’elle commence sereinement ou au cœur d’épreuves (prématurité, hospitalisation, séparation…).
La parole comme base du lien affectif
Parler à son bébé, ce n’est pas seulement lui transmettre des informations. C’est lui dire : « Tu es là, je te vois, tu existes pour moi ».
Les mots, le ton, le rythme, mais aussi le regard et la posture créent un climat émotionnel qui nourrit son sentiment de sécurité.
Catherine Gueguen, pédiatre, rappelle que la voix des parents active chez le bébé des zones cérébrales liées aux émotions et à la mémoire. De son côté, Daniel Stern, psychiatre et chercheur, a montré que les échanges précoces constituent une véritable « danse relationnelle » qui façonne le développement affectif.
Avant la naissance : la voix comme repère
Dès la 26ᵉ semaine de grossesse environ, l’oreille interne du fœtus est suffisamment développée pour reconnaître la voix maternelle. Parler à son bébé avant la naissance, c’est déjà lui offrir un cadre sécurisant, une première empreinte affective.
Quelques idées pour mettre en pratique :
- Lire à voix haute une histoire ou un texte que vous aimez
- Chanter ou fredonner régulièrement la même mélodie
- Parler de vos émotions (« Aujourd’hui je me sens détendu(e) », « Je suis un peu inquièt(e)»)
Ces petites habitudes aident le bébé à associer votre voix à une sensation de sécurité et facilitent la continuité du lien après la naissance.
Après la naissance : la continuité du dialogue
Une fois le bébé dans vos bras, la communication précoce prend d’autres formes :
- Décrire ce que vous faites : « Je te mets ton pyjama », « On va sortir »
- Répondre à ses signaux (pleurs, mimiques, mouvements) par des mots
- Nommer ses émotions : « Tu as l’air surpris », « Tu sembles apaisé »
Ces gestes simples aident l’enfant à mettre du sens sur ce qu’il vit et soutiennent la construction de son monde intérieur.
En néonatologie, même auprès de bébés intubés, sous couveuse ou très prématurés, j’ai vu que ces paroles pouvaient apaiser, donner un repère et renforcer le lien parent-bébé malgré la distance physique et les inquiétudes.
Et si je n’ai pas envie ou pas les mots ?
Il arrive que la fatigue, le stress ou certaines épreuves rendent cette communication difficile. Dans ces moments, se forcer n’est pas la solution. Le lien peut aussi passer par le toucher, le regard, ou la simple présence silencieuse. L’important, c’est la qualité de la relation, pas la quantité de mots. Et on peut tout à fait s’autoriser à dire à son bébé « là, je ne me sens pas disponible ».
En résumé
Parler à son bébé avant et après la naissance, c’est plus qu’un geste tendre. C’est un acte fondateur qui participe à son développement émotionnel, cognitif et relationnel. Les mots, les sons, les intonations créent un socle sur lequel il pourra s’appuyer toute sa vie.
Comme le rappelle Catherine Gueguen, « Un enfant a besoin de se sentir entendu, compris et aimé pour développer tout son potentiel ».
Pour aller plus loin
Un lien vers une vidéo de Valeria Lumbroso, pour le réseau Parinatalité PACA : https://reseaumed-tv.com/documentaires/tisser-des-liens/conversation